Big data et data analytics : dans de nombreux secteurs, ce ne sont pas seulement des termes à la mode. L’analyse des données génèrent en effet des innovations importantes et – attention : encore un mot à la mode – de la disruption. Sans big data, pas d’Uber, sans data analytics pas de marketing ciblé. Et dans le transport ? Chaque poids lourd est une source quasi inépuisable d’informations : localisation, vitesse, consommation, émissions, freinage et accélération… Une mine d’informations sous le capot qui permet à tout transporteur d’optimaliser sa façon de travailler. Pour pouvoir utiliser ces données, elles doivent être ouvertes. Les transporteurs doivent pouvoir les consulter et – éventuellement via des partenaires – les intégrer dans un logiciel d’analyse pertinent. Nous avons contacté les grandes marques et leur avons demandé un état des lieux.

Données accessibles

Tous les constructeurs qui nous ont répondu disposent de leur propre plate-forme télématique et mettent certaines données à disposition de l’utilisateur final via leur propre système. Que vous rouliez avec Volvo Trucks, Scania, MAN, Renault Trucks, Mercedes-Benz ou Iveco, au moins une partie de la flotte est équipée d’un système télématique accessible. Moyennant paiement ou non, vous accédez aux données via une interface web, ou un rapport est envoyé chaque semaine dans votre boîte mail. Plusieurs marques mettent aussi les données à disposition du chauffeur en temps réels pour attirer son attention sur son style de conduite et lui indiquer une manière de faire plus écologique et plus sûre. Les constructeurs offrent, contre paiement, des actualisations permettant de disposer de données complémentaires. Mais pouvez-vous exploiter les données brutes ? Pouvez-vous, via une API – une application programming interface est une série de conventions permettant aux programmes informatiques de ‘parler’ entre eux – travailler vous-mêmes avec ces données ? Il semble que oui d’après notre tour de table. « L’avantage du travail via une API réside dans le fait que les clients ne doivent plus investir dans leurs propres ordinateurs de bord », déclare-t-on chez Scania, la marque qui a présenté plus tôt cette année Scania One. « Scania One constitue un écosystème ouvert indépendant des marques pour des services existants et futurs de Scania et de tiers avec la polyvalence d’une tablette Android. Scania va lui-même ajouter constamment de nouvelles fonctions et aussi encourager les développeurs externes à ajouter des services utiles afin de bâtir un écosystème pour des solutions optimales et efficaces. » Volvo Trucks – chaque abonné Dynafleet peut utiliser les données de la plate-forme télématique – permet lui aussi d’exploiter les données avec des applications propres. Le constructeur recherche même activement des tiers qui veulent développer des solutions pour les transporteurs. « Plus tôt cette année, nous avons organisé pour cela notre Volvo Trucks Hackathon Challenge. Pendant 30 heures, des données Dynafleet ont été fournies en temps réels aux participants leur permettant d’élaborer des solutions visant à mieux cerner le coût du transport, mais aussi à l’abaisser. » Chez Mercedes-Benz FleetBoard, ces données sont également libres d’accès pour des applications de tiers. « Outre un éventail très vaste de services relatifs à la gestion des véhicules, FleetBoard propose aussi des services de gestion du tachygraphe et une ‘solution sur mesure’ pour toutes les questions logistiques que pourrait se poser un prestataire logistique », explique le constructeur. « Ce sont précisément ces intégrations qui fournissent une plus-value aux deux parties. » La marque à l’étoile propose elle aussi un environnement Android ouvert et multifonctionnel via sa propre plate-forme ‘FleetBoard App Store’ qui offre de nombreuses possibilités en matière d’intégration. « Autre exemple de l’utilisation de données : notre nouveau service ‘Uptime 2017’ par lequel Mercedes-Benz va détecter et empêcher les immobilisations et les pannes de façon proactive afin de limiter au maximum l’arrêt d’un véhicule. » Même son de cloche chez MAN où l’on pointe la possibilité pour les constructeurs de développer leur propre système sur base de leurs données. Chez Renault Trucks, où un accès direct aux données brutes via une API est possible en option en plus des applications télématiques ordinaires, on voit l’intérêt des données ouvertes croître constamment. « La tendance suivante va certainement se dégager : la livraison et la vente de données qui peuvent être générées par le poids lourd au lieu de la vente d’une application télématique liée au constructeur. »

Accroître la productivité

« Le but des services en ligne proposés par Scania est toujours d’accroître la productivité du parc », déclare-t-on avec conviction chez le constructeur de l’écurie VW. Les autres constructeurs sont sur la même longueur d’onde et citent le track&trace, l’évaluation du chauffeur et la planification proactive des entretiens comme applications possibles. « Le client peut, en fonction de ses exigences, composer ses packs de sorte à ne voir que les données dont il a besoin », entend-on chez MAN. « Tout fonctionne ainsi beaucoup plus efficacement. » Chez Volvo Trucks, on se réfère explicitement aux tiers qui, en plus des données du tracteur, élaborent des applications, par exemple pour savoir très précisément ce qu’a fait le chauffeur et combien de temps a duré le ravitaillement, le chargement, le déchargement… « Ces données d’activités Dynafleet sont traitées par Digicreate.be BVBA dans une plate-forme ERP créée sur mesure. Nous pouvons ensuite suivre les données chauffeurs en temps réels et les utiliser pour le calcul mensuel des salaires. » Et donc la réponse à la question de départ est claire : oui, dans le secteur du transport aussi, la disponibilité des données mènera à une productivité accrue et il n’est pas exclu que les big data déboucheront finalement, dans ce secteur aussi, sur la disruption.

Par le biais d’une API – Application Programming Interface -, une société peut elle-même exploiter les données.