Groep Joosen : la troisième fois fut la bonne

C’est à son troisième essai que Kurt Joosen a réussi à empocher la timbale. Et il reconnaît aujourd’hui que lors de ses deux premières tentatives, sa société n’était pas prête à endosser le costume de Transporteur de l’Année. 2009 – 2013 – 2018. Trois éditions du concours du Transporteur de l’Année qui ont vu Transport Joosen (d’abord) et Groep Joosen (ensuite) tenter sa chance avec pas mal de succès. Il a cependant fallu attendre cette année pour transformer l’essai. Avec le recul, Kurt Joosen mesure mieux le chemin parcouru avec sa société de transport de conteneurs. “Il fallait grandir vite” Lors de ses deux premières participations, Joosen était une société en forte croissance, et la forte personnalité de son ‘patron’ participait aussi à une certaine forme de notoriété. En 2018, Kurt Joosen a pu ajouter à son dossier une solide dose de professionnalisation et des résultats financiers enfin conformes à ses efforts des années précédentes. “La première fois, j’étais encore un peu naïf. Je travaillais beaucoup à l’intuition quand nous étions encore installés à Brecht, mais nous n’avions pas de réelle structure.” La première étape majeure dans l’évolution de Transport Joosen a été son déménagement vers le port d’Anvers. “Au départ, nos transports se faisaient principalement vers les Pays-Bas et vers la Ruhr en Allemagne. Pour ces destinations, Brecht était une bonne localisation. Mais à un moment donné, nous avons eu l’opportunité de rouler pour Daikin à Ostende, puis pour des clients qui nous ont envoyés dans le Nord de la France. Et prendre des conteneurs au port d’Anvers, repasser par Brecht pour aller dans le Nord de la France, ce n’est pas vraiment efficace. Déménager vers la zone portuaire était donc une nécessité, encore fallait-il trouver un terrain. Finalement, la solution est venue d’Inchape qui a bien voulu nous céder 5000 m2 sur sa concession.” Le déménagement a finalement eu lieu à la fin de l’année 2012. Avec pour première conséquence une diminution drastique des amendes pour infractions aux temps de conduite et de repos… mais le site s’est rapidement révélé trop petit. “Dans tous les terminaux, je constatais la même chose : pour réaliser une vraie percée, il fallait que je puisse réaliser un vrai hub où charger et décharger les conteneurs nous-mêmes. Heureusement, un autre terrain s’est libéré en 2016, nous avons acquis un reachstacker et nous avons pu continuer à grandir.” L’importance de ces investissements et le rythme de cette croissance avaient cependant un revers : la société Transport Joosen ne parvenait pas à être suffisamment rentable. “Nous grandissions trop vite, analyse Kurt Joosen aujourd’hui. Pour structurer notre travail, j’ai d’abord recruté un gestionnaire pour la flotte, puis un responsable financier et enfin un responsable HR. Tout cela, j’aurais peut-être dû le faire deux ans plus tôt, mais j’étais tellement absorbé par l’opérationnel que je n’ai pas pu le faire. Pour absorber les coûts engendrés par notre nouveau terrain et par le stacker, il me fallait toujours plus de volumes, et le marché nous les offrait. A un moment donné, je me suis rendu compte que je n’avais pas toutes les compétences à moi tout seul…” De l’intuition à la structure Sur ce plan, en 2018, Groep Joosen présente le profil-type d’un Transporteur de l’Année. Sur le plan opérationnel, le CEO Kurt Joosen est assisté par les responsables des services Prévention, Qualité, Opérations, Finance & HR, Fleet et Pricing. Cette équipe gère les trois pôles d’activité du groupe, à savoir le transport, le pesage de conteneurs (une des activités à valeur ajoutée que Joosen a pu développer sur son site actuel) et la logistique, qui constitue à fournir aux clients un service complet autour de leurs transports par conteneurs. En plus de cette organisation fonctionnelle, Groep Joosen s’est doté d’un Conseil d’Administration, puis d’un Conseil de Surveillance dans lequel siègent des administrateurs indépendants, suivant en cela les recommandations du Code Buysse. Les décisions stratégiques sont prises au niveau du Conseil de Surveillance et avalisées par le Conseil d’Administration. Le terrain qu’occupe Groep Joosen depuis 2016 a aussi permis à la société de mieux structurer ses opérations, avec un garage qui permet d’entretenir une partie du matériel et l’espace nécessaire pour stocker des conteneurs et pour proposer un service de pesage de containers conformément aux règles SOLAS. “Sur le plan opérationnel, nous pouvons aussi beaucoup mieux combiner le transport local, entre terminaux, avec nos activités de transport national et international”, explique Kurt Joosen. “Mais en développant nos activités vers la France, nous avons aussi dû nous organiser différemment. C’est pourquoi nous collaborons avec un transporteur à Charleroi et un autre à Mouscron pour installer chez eux un point de relais vers la France. Les volumes ne sont pas encore suffisants pour organiser de véritables navettes, mais on y travaille, notamment en développant le transport sous températures contrôlées vers le nord de la France et en étendant les horaires de fonctionnement de notre dispatching à la nuit…” La balle est dans le camp de PSA La nuit, justement, est un peu l’eldorado des spécialistes du transport de conteneurs à Anvers. “Travailler davantage de nuit aurait deux avantages, explique Kurt Joosen. Nous pourrions développer davantage notre chiffre d’affaires tout en contribuant à réduire les problèmes de mobilité que les travaux d’infrastructure en cours aggravent. A l’heure actuelle, deux terminaux à conteneurs sont ouverts 24 heures sur 24 (DP World au quai 1700 et PSA au quai 1742, NDLR), mais pour que tout le monde en retire des bénéfices, il faudrait que tous les terminaux et dépôts jouent le jeu.” Avec Van Moer Group, Katoen Natie, GTS et Tabak Natie, Group Joosen a donc pris le taureau par les cornes pour sensibiliser tous les acteurs concernés en mars dernier. “J’espère vraiment que PSA, en particulier, va étendre à ses deux autres terminaux l’expérience menée au Deurganckdok. Si nous pouvons opérer 24 heures sur 24, tout le monde en retirera le bénéfice. De notre côté, cela nous permettrait de beaucoup mieux combiner les journées longues et les journées courtes pour nos chauffeurs.” Chez Joosen, sur les 22 chauffeurs qui travaillent la nuit, il y en a suffisamment qui sont intéressés par des journées ‘longues’ (15 heures de travail), d’autant plus qu’ils ont alors droit à ‘leur’ tracteur, alors que les chauffeurs qui font des journées de 12 heures passent d’un tracteur à l’autre. Politique HR Parmi ces 150 chauffeurs, on retrouve un peu toutes les nationalités, et la langue véhiculaire au sein de l’entreprise est devenue l’anglais. « Une bonne partie de nos chauffeurs salariés en Belgique proviennent de Roumanie. Mais il y a aussi des Grecs, des Allemands, des Français… autant de cultures différentes, mais que nous faisons travailler ensemble. » Groep Joosen a notamment structuré sa politique HR autour de courtes réunions ‘toolbox’, éventuellement en présence d’un interprète, avec le concours de son partenaire en formation Atrium. Ces réunions portent soit sur des aspects particuliers du manuel du chauffeur, soit sur des instructions spécifiques à certains clients. Quant au programme de formations Code 95, il est ici couplé à un principe BBS (pour Behavior Based Safety) qui met l’accent sur les comportements et leur impact sur la sécurité des opérations. « Atrium nous aide également à suivre le comportement de conduite de tous nos chauffeurs, et depuis que nous partageons ces données avec les coaches, nous avons pu faire diminuer notre consommation moyenne de façon spectaculaire. Les chiffres relatifs à la sinistralité se sont aussi largement améliorés, et je m’attends à ce que cette politique rejaillisse aussi positivement sur la valeur résiduelle de notre matériel roulant », explique Kurt Joosen. Un redressement spectaculaire Les diverses initiatives prises pour professionnaliser la société, combinées à une conjoncture économique favorable, ont permis à Groep Joosen de redresser ses résultats financiers de manière spectaculaire. La totalité des bénéfices réalisés en 2017 ont été transférés aux fonds propres, et le suivi mensuel de tous les paramètres financiers laisse augurer d’une belle année 2018. « 2018 va d’ailleurs être une année intéressante pour nous, puisque quelques gros investissements seront définitivement amortis », commente Kurt Joosen. Mais le Transporteur de l’Année a aussi un message à faire passer à ses clients : « Pendant des années, nous avons fait ce qu’il fallait pour gagner de nouveaux clients, puis pour les conserver. Aujourd’hui, tout le monde est conscient que la capacité de transport atteint ses limites. Nous sommes prêts à garantir une certaine capacité à nos clients, même pendant les semaines où il y a des jours de congé, mais il y a des choses que nous ne faisons plus pour rien. Je pense que les clients sont prêts à entendre ce discours. Ils pourraient souvent trouver quelqu’un qui travaille à un tarif inférieur au nôtre, mais les frais cachés qu’ils devraient subir en cas de rupture de capacité font que le jeu n’en vaut pas la chandelle. » Une politique que Kurt Joosen peut désormais pratiquer avec d’autant plus d’assurance qu’il se place souvent aux avant-postes de l’innovation. Il exploite déjà quatre éco-combis dans l’enceinte du port et participera certainement au deuxième projet-pilote de la région flamande (« j’avais un projet entre Meer et Rekkem la première fois, mais j’ai rentré mon dossier un tout petit peu trop tard », se rappelle Kurt Joosen) et il continue à encourager l’utilisation raisonnée du parc en participant activement à la bourse de fret Hakka, spécialisée dans le transport de conteneurs. Hakka est le nom de la société qui a repris à Groep Joosen le développement de l’outil que Kurt Joosen avait lancé sous le nom d’Eurotranscon il y a quelques années, et son savoir-faire ne peut que déboucher sur une nouvelle version de l’outil encore plus performante. Ici aussi, Kurt Joosen ne pouvait pas tout développer tout seul… encore fallait-il lancer l’idée. L’émotion du 1er mars Et voilà donc comment un pur entrepreneur a dû attendre d’être devenu une société structurée pour décrocher la timbale du Transporteur de l’Année. Une histoire qui rappelle d’autres lauréats récents… et qui doit susciter les espoirs d’une jeune génération de transporteurs en devenir. Le mot de la fin revient cependant à Kurt Joosen : “J’ai reçu énormément de réactions positives après l’annonce de notre succès. Mais ce qui m’a fait le plus plaisir, c’est de voir le bonheur de mes parents qui étaient dans la salle !” Comme quoi le transport routier reste avant tout une affaire d’êtres humains avant tout… Groep Joosen en bref

  • Siège central : Anvers
  • Spécialité : transport de conteneurs et services connexes (pesage, stockage…)
  • Direction : Kurt Joosen (CEO), John Smet (CFO), Yves Haud’Huyze (COO)
  • Chiffre d’affaires (2017) : 30.8 millions EUR
  • Bénéfice (2017) : 625.000 EUR
  • Personnel : 182 personnes, dont 154 chauffeurs
  • Flotte : 125 tracteurs, 350 châssis-conteneurs, 4 semi-remorques bâchées, 3 stackers, 2 chariots 10 tonnes

« J’aurais peut-être dû renforcer la structure de l’entreprise deux ans plus tôt, mais j’étais tellement occupé à la faire grandir… » (Kurt Joosen)

Interview VIP

  • Pour qui avez-vous le plus d’admiration (en général ou dans le monde économique)? Mon équipe
  • Qu’est-ce que vous auriez voulu inventer vous-même ? Avantida, une start-up anversoise qui est devenue le leader de la gestion des conteneurs pour les lignes maritimes.
  • Pour quelle œuvre d’art avez-vous le plus d’admiration ? Mes enfants !

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